Johann Charpenet : « L’ambiance des Costières nous transcendait »
L’ancien capitaine des Crocodiles a été formé à Lyon mais c’est à Nîmes qu’il a découvert le professionnalisme.
L’Olympique Lyonnais et Nîmes Olympique s’affrontent ce soir pour le compte de la quatrième journée de Ligue 1. C’est l’occasion de retrouver Johann Charpenet pour qui l’OL et le NO sont les clubs de cœur. Le défenseur central a adoré son passage dans le Gard et il n’a pas oublié Pagis, Brouard, Boissier et les autres. Des parcours en Coupe de France aux déboires en championnat, en passant par son but contre Monaco, c'est avec gourmandise que l'ancien capitaine de Nîmes fait un bond de 20 ans dans le passé.
Objectif Gard : Que devenez-vous depuis l’arrêt de votre carrière en 2012 ?
Johann Charpenet : J’ai commencé par être commercial au club de Roanne, après j’ai vendu des portes-fenêtres. Maintenant, je suis responsable de formation chez Loxam (NDLR : société de location de matériel de BTP). Je suis très heureux de pouvoir profiter de ma famille.
Quel est le souvenir qui vous revient en premier quand on vous parle du Nîmes Olympique ?
Le quart de finale de la Coupe de France contre Monaco. Ce soir-là, nous avons fait vibrer le stade des Costières. Nous n’étions pas les favoris, mais nous les avions poussés jusqu’aux tirs aux but et on s'est qualifiés. On a pris un plaisir énorme et c’était extraordinaire.
Lors de ce match c’est vous marquez le but des Crocodiles (1-1 puis qualification de Nîmes trois tirs aux buts à un).
Oui, sur coup-franc. Ça c’est anecdotique, le plus important était de partager ce moment avec le public, car en championnat nous n’avions pas des bons résultats.
Ce but contre Monaco n’est pas si anecdotique que vous le dites.
Avec Sladan Djukic, nous nous partagions les coup-francs. Cette fois-là, c’est lui qui a pris le ballon dans ses mains, mais je suis arrivé et le lui ai dit « pousse-toi, je le sens bien ce coup-franc ». La distance me convenait donc ça s’est fait naturellement.
Vous étiez en quelque sorte le Juninho du Nîmes Olympique.
(Rires) Oui, un petit peu, mais j’étais loin d’avoir le talent de Juninho. Avec Yoann Bouchard, qui était le gardien de but remplaçant, je travaillais les coups-francs à l’entraînement.
Avec Nîmes vous avez participé à deux demi-finales de Coupe de France. Que vous a-t-il manqué pour aller plus loin ?
Je regrette que l’on n’ait pas joué ces demi-finales à domicile. Que ce soit Nantes en 1999 ou Lorient en 2002, se sont des matches que nous aurions gagné aux Costières. L’ambiance des Costières nous transcendait et avec l’aide du public, nous étions capables de tout. On avait des jeunes, comme Yann Jouffre, qui avaient besoin de ce grain de folie pour se surpasser.
En revanche en championnat c’était un peu plus compliqué...
Surtout la dernière année. Nous avions beaucoup de mal à marquer des buts. Nous avons passé la saison dans le doute.
La Coupe de France n’a-t-elle pas été privilégiée par les joueurs ?
Je ne pense pas. C’était notre bulle d’oxygène et nous la jouions sans pression. En revanche, en championnat nous avions toujours le couteau sous la gorge.«
Vous avez travaillé avec trois entraîneurs à Nîmes. Quels souvenirs vous ont-ils laissé ?
J’ai eu Pierre Mosca très peu de temps, puisqu’il a rapidement été remplacé par Serge Delmas. Ce dernier était un formateur qui vivait le match à 200%. Avant que l’on reçoive le ballon, il nous criait déjà ce qu’il fallait faire. Après, Dominique Bathenay était le sage. Il disait les choses très calmement. Enfin, il y a eu Bernard Boissier. Lui c’était le Nîmois, le passionné. C’est celui qui arrivait à nous transcender avec ses discours d’avant-match.
Avec quel entraîneur nîmois vous êtes-vous senti le plus proche ?
J’ai beaucoup aimé monsieur Bathenay que j’ai eu ensuite à Sedan. Quant à Bernard, sa façon de travailler me plaisait. Il était proche de nous. Entre nous, il y avait une confiance réciproque. On pouvait partir à la guerre avec lui. Il nous amenait sa rage de vaincre. Quand il participait aux jeux de l’entraînement, c’était pour gagner. Son discours était très motivant.
Aviez-vous un modèle sur le terrain ?
Avec Régis (NDLR : Brouard), nous avons dix ans d’écart et je le voyais comme le patron, un modèle. Tous les matins, je buvais le café avec lui et nous parlions de la vie et du foot. J’ai beaucoup appris de ses paroles.
Vous avez connu quatre présidents en quatre ans, ce n’est pas idéal pour progresser...
Je pense que cela a influé sur nos performances. Chaque fois on nous promettait des choses et ça a été un peu folklorique.
Avez-vous le souvenir d’un déplacement en particulier ?
Oui, il y en a eu un qui a été rocambolesque. À Lorient, notre avion a raté l’atterrissage à cause du vent. L’avion a tapé la piste et on a été détournés à Rennes. On a eu très peur. Certains pleuraient et d’autres vomissaient. Personne ne faisait le malin. Étienne Mendy ne craignait pas l’avion, il restait toujours calme. Mais sur ce coup, il a perdu son flegme et il nous a dit : « Là, les gars, on n’est pas bien ». Ça nous a encore plus inquiété.
Pour mettre de l’ambiance, il fallait compter sur qui ?
Un peu tout le monde, mais Jean-Luc Vannuchi était un gros brancheur. J’étais souvent avec Régis Brouard, Ronan Salaun, Remi Loret et Mika Pagis. On se voyait en dehors du foot. Ce sont des gens que j’aimerais bien revoir pour parler du passé. J’ai toujours travaillé dans une bonne ambiance à Nîmes, il y avait Michel Imbert qui amenait cette bonne humeur. Le dimanche, aux Courbiers, madame Gadéa nous payait l’apéro, après l’entraînement. C’était une autre approche du football que ce qui se fait actuellement.
Parmi les joueurs que vous avez côtoyé à Nîmes, quels sont ceux qui étaient les plus forts ?
Johnny Ecker était un arbre, le patron de la défense. Lamine Sakho qui a performé avec nous mais je pense surtout à Mickael Pagis. Il était au-dessus du lot.
Sur le terrain, vos débuts ont été un peu compliqués. Vous avez eu du mal à vous imposer.
Je sortais du centre de formation de Lyon, et l’environnement était totalement différent à Nîmes. J’ai découvert le monde professionnel. Il a fallu s’adapter à tout, et ça a mis un peu de temps. Johnny Ecker m’a beaucoup aidé.
Que représente l’Olympique Lyonnais pour vous ?
J’y ai passé huit ans, de 14 à 22 ans. J’ai vécu dans de ce club des grands moments.
Vous êtes natif de Roanne, dans le département de la Loire, pourquoi ne pas avoir choisi Saint-Étienne pour votre formation ?
À l’époque, Lyon, l’ASSE et Sochaux m’avaient fait des propositions. Avec mes parents on a choisi l’OL qui avait le centre de formation le plus performant des trois. Cela a été un crève-cœur pour mon papa qui est supporter des Verts. Il a même failli m’appeler Oswaldo, en hommage à Piazza le célèbre défenseur stéphanois.
Revenez-vous parfois dans le Gard ?
Non, mais il faut que je descende pour voir deux familles qui comptent pour moi. Je pense à madame Gadéa qui était une supportrice et qui m’a logé pendant quelques temps. C’est quelqu’un d’important qui était à mon mariage.
Allez-vous regarder le match entre l’OL et Nîmes ce soir ?
Je ne pourrai pas parce que je suis témoin à un mariage mais je regarderai régulièrement sur mon téléphone. Le président Aulas a attribué aux anciens du club deux places à vie au Groupama stadium. Je suis beaucoup Lyon, mais je ne choisirai pas entre l’OL et Nîmes.
Propos recueillis par Norman Jardin 18 septembre 2020